L’annulation du traité INF sur les missiles intermédiaires par les USA

  • stoprussophobie redaction
  • mercredi février 13, 2019
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L’annulation du traité INF sur les missiles intermédiaires par les USA

globallookpress.com

La dénonciation du traité INF par les USA : l’Europe première victime

 

Washington a annoncé au début février 2019 son retrait du traité INF, signé en 1987. Une décision mûrie de longue date par les Etats-Unis, qui ouvre la porte au déploiement de missiles nucléaires de portée intermédiaire sur le sol européen. Et pas seulement !

Les Etats-Unis se sont retirés du traité sur les armes nucléaires de portée intermédiaire (INF), aboutissement d’une décision annoncée le 20 octobre 2018 par Donald Trump, et d’un ultimatum adressé début décembre à la Russie, lui donnant 60 jours pour s’y conformer.

En 1987, le traité INF avait mis un terme à la crise des euromissiles en abolissant l’usage des missiles terrestres d’une portée de 500 à 5 500 km. Dans les années 1980, la crise avait été ouverte par le déploiement des SS-20 soviétiques à têtes nucléaires ciblant les capitales occidentales et les missiles Tomawhak américains déployés en Europe.

Les Etats-Unis ont donc mis fin en février 2019 à l’application du traité dit INF d’interdiction des missiles de portée intermédiaire (de 500 à 5.500 km). Formellement, l’annulation du traité ne devrait intervenir que six mois plus tard et une sorte d’ultimatum était encore donné à la Russie pour aller à Canossa et “respecter” le traité qu’elle a été accusée de “violer”. La rupture du traité avait été annoncée en fait par le président Trump dès octobre et il ne s’était pas donné la peine d’invoquer de quelconques prétextes. Ce n’est que 60 jours avant de procéder à la “suspension” de février, que les Américains ont entamé une campagne de presse (cette dernière complaisante comme toujours) pour renverser les faits, afin de se donner le beau rôle et justifier leur attitude pour l’opinion non avertie.

La position russe :

En fait, la Russie n’a aucun avantage à dénoncer le traité et elle a tout fait pour le maintenir, y compris en fermant les yeux sur les violations américaines de ce traité et les aspects qui ne l’arrangeaient pas, comme la limitation de l’accord aux missiles terrestres. Ne serait-ce que parce qu’elle ne veut pas recommencer une course aux armements qui a contribué à la chute de l’URSS. Nous y reviendrons.

Faire payer l’Europe

De leur coté, les Etats-Unis veulent arrêter ce traité limitant leurs possibilités de développer de nouvelles armes, voire une nouvelle stratégie, qui leur permettraient notamment de relancer des commandes à leur complexe militaro-industriel. Et comme les nouveaux missiles à courte et moyenne portée seront destinées au théâtre européen, eh bien l’astuce sera de faire payer aux Européens, sous couvert de “menace russe”, de russophobie entretenue médiatiquement et par pressions financières diverses, permises par les sanctions et l’extra-territorialité juridique que les USA ont imposée aux Européens qui n’osent pas s’y opposer (souvenez vous de l’amende de 9 milliards de dollars de la BNP). La tension militaire et diplomatique contribuera à faire passer la pilule aux opinions européennes. C’est le sens de la hausse de la participation à hauteur de 2% de leur PIB des Européens au budget de l’OTAN exigée par Trump. Malheureusement là aussi, on cède…

C’est un peu le même principe que le gaz : les Américains veulent nous refiler leur gaz de schistes. Pour celà ils intensifient la propagande anti-russe, les sanctions, s’opposent au gazoduc de la mer du nord (North stream2) qui permettra pourtant un approvisionnement sécurisé et régulier et moins coûteux pour nous. Ils veulent nous obliger à installer des ports pouvant recevoir du gaz liquéfié extrait aux USA à un prix écologique et financier élevés. Il couterait 30% de plus que le gaz russe mais permettrait aux Etats-uniens de rattrapper leur déficit endémique et leur endettement abyssal que permet pour le moment la domination du dollar en se servant chez les encore solvables, c’est à dire nous Européens de l’ouest.

Pour les missiles, celà pourrait être pareil mais en plus nous aurions une double peine : en cas de conflit avec la Russie, ce sont les Européens qui auront accepté d’installer des missiles américains (aujourd’hui déjà la Pologne et la Roumanie), qui subiront les tirs de rétorsion. Ce n’est pas une supposition catastrophiste. Car d’ores et déjà les USA ont commencé à produire de nouveaux missiles de moyenne portée qu’ils envisagent d’utiliser avec des têtes nucléaires moins puissantes que celles des armes stratégiques. Ils pensent pouvoir ainsi lancer des attaques nucléaires qui pourraient rester locales car la Russie n’oserait pas répliquer en frappant le sanctuaire états-unien. Ca ferait donc des conflits “proxy” comme ils aiment : avec les frais payés par les autres, les destructions subies par les autres (nous autres), les ennemis tués en nombre sans qu’ils osent répliquer, sous peine d’être détruits complétement.

La menace pour l’Europe de la nouvelle approche US

Ce calcul est absurde et dangereux. En cas de tir de missile US à partir d’un pays européen limitrophe de la Russie, comment les Russes peuvent-il savoir quelle puissance renferme la ou les têtes nucléaires ? Et la distance étant réduite et les vitesses très grandes, le temps de réaction est miniscule. Les Russes ont donc annoncé qu’ils feraient tout “en miroir”. Les Etats-uniens suspendent le traité ? Nous suspendons le traité. Ils disent qu’ils l’annuleront dans six mois ?. Nous aussi. Ils vont développer de nouveaux missiles et renforceront leurs installations soit-disant défensives aux frontières de la Russie ? Nous ne pointerons pas de missiles de rétaliation contre les pays européens qui n’auront pas installé de missiles américains. Ils sont prêts à tirer à tirer contre la Russie en première frappe avec des missiles susceptibles d’être de puissance moins importante ? Comme on n’en sait rien, on utilisera nos nouvelles armes hypersoniques comme on le jugera bon, y compris contre les Etats-unis et pas seulement contre les pays dont sont partis les tirs. Or, 10 missiles Sarmat effaceraient de la carte complétement les Etats-unis.

En dehors de l’aspect financier qui nous portera préjudice si nos gouvernants à leur habitude ne résistent pas, cette situation est évidemment terriblement angoissante. Les Américains jouent avec le feu. Sans doute prêts à tout pour garder leur monopole de pouvoir mondial et de suprématie financière. Un, élément inquiétant est que les générations qui accèdent maintenant au pouvoir n’ont pas connues la guerre, ni même la génération qui a subi les guerres mondiales. Et qu’elles pensent possible de gagner un conflit nucléaire ! La haine russophobe est réellement dangereuse !

Les échanges en langue de bois : traduction

En jargon états-unien qui inverse comme toujours les choses, cette intention de développer de nouvelles armes en se débarrassant du traité et de faire payer les Européens (peut-être aussi les Japonais si on lit bien et ce qui expliquerait les tensions autour des îles Kouriles) est exprimée ainsi par le président Donald Trump :

«Nous allons mettre au point les différentes variantes de notre propre réponse militaire et allons travailler avec l’OTAN et les autres alliés et partenaires pour ne pas laisser à la Russie un quelconque avantage militaire en raison de sa conduite illégale”, a déclaré Donald Trump.
Le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a lancé officiellement un ultimatum formel à la Russie en l’enjoignant de “respecter le traité” sous peine de rompre définitivement cet accord, ce qui était déjà fait en réalité.
Les “alliés” de l’OTAN ont aussitôt obtempéré en accusant la Russie. Certains “membres”, dont la France ont dit “regretter” la rupture du Traité INF.

Depuis deux mois, Washington accuse Moscou de «violations flagrantes» du traité INF et lui demande de «détruire son système de missiles non conformes», comme l’avait notamment fait savoir la sous-secrétaire d’Etat américaine chargée du Contrôle des armements et des Affaires de sécurité internationales, Andrea Thompson, à la mi-décembre.

Le prétexte des missiles 9M729

Au cœur de l’accusation américaine se trouve le système de missiles russe 9M729, un missile terrestre pouvant être porteur d’une tête nucléaire et dont la portée dépasserait 500 kilomètres – selon l’OTAN et les Etats-Unis – ce qui le ferait tomber sous le coup du traité INF. Pour le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, ces missiles pourraient frapper les villes d’Europe en quelques minutes après avoir été tirés de l’intérieur du territoire russe. Il n’a évidemment pas mentionné qu’il en est de même dans l’autre sens avec les missiles US disposés en Pologne et en Roumanie…

Pour tenter de sauver le traité, le ministère de la défense russe a fait une démonstration complète aux attachés militaires et à la presse du fameux missile 9М729, contesté par les Américains. Le général Mikhail Matveevsky, chef des armées des missiles a indiqué que le missile 9M729 du complexe nommé Iskander-M ne peut violer le traité INF car il ne peut pas emporter suffisamment de carburant pour dépasser 500 km de portée. Or le plein et la fixation de la tête nucléaire ne peuvent se faire qu’en usine. Les missiles sont livrés en conteneurs. Il est donc impossible de rajouter du carburant sur le champ de bataille… Selon lui, ce missile est en fait une version améliorée du missile 9M728 et son réservoir est le même. Jusqu’à présent, les Etats-unis n’ont jamais trouvé à redire contre ce missile.

Evidemment, les attachés militaires états-uniens n’ont pas jugé utile de se déplacer. La représentante de l’ambassade US à Moscou, Andréa Kalan a estimé que les Russes pouvaient raconter n’importe quoi et que de toutes les façons la position des Etats-unis ne changerait pas.

En plus du missile 9M729, Washington s’est mis à reprocher à Moscou d’avoir mis en service en 2016 le missile stratégique ballistique RS-26 “frontière”. Ce missile là a une portée de 12.000 km. En vertu du principe que qui peut le plus, peut le moins, les représentants US accusent les Russes de violer le traité car ce missile peut donc atteindre aussi des cibles à 2.000 km. ! CQFD ! On peut bien sûr sans doute enfoncer un clou avec un marteau piqueur. Mais est-ce bien judicieux ? Et puis pourquoi s’en apercevoir seulement maintenant après près de trois ans de service ?

La sourde oreille des Etats-uniens et le “miroir” russe

Les Russes ont donc rejeté les accusations des USA. La porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova a pointé du doigt la décision des Etats-Unis de se retirer du traité sur les armes nucléaires à portée intermédiaire INF, dès le 1er février, sur la chaîne de télévision publique Rossia 1, dénonçant une «stratégie des Etats-Unis de s’affranchir de leurs obligations juridiques internationales dans différents domaines». Elle a en outre exigé que les Etats-Unis produisent des preuves de leurs accusations. Washington reproche en effet à Moscou de violer ce traité. «Ne pourriez-vous pas présenter des preuves, outre que vos tweets, de la manière dont la violation a été commise ? Aucune preuve, aucune photo satellite […] aucun témoignage», a demandé Maria Zakharova.

La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères a enfin annoncé que si les Etats-Unis quittaient vraiment le traité, Moscou se réservait «le droit à une réaction appropriée et à une riposte». D’autres responsables russes et le président Poutine lui-même ont assuré leur population que les leçons du passé avaient été retenues et qu’il n’était pas question de se lancer dans une course aux armements ruineuse dans laquelle les Etats-unis cherchent à entraîner la Russie.

Les accusations russes

On peut ajouter à celà que les Russes aussi reprochent aux Américains des violations nombreuses, déjà anciennes et prouvées du traité INF. Le ministre russe des Affaires étrangères Serguei Lavrov l’a déclaré officiellement en réponse aux accusations états-uniennes, alors que jusque là les Russes restaient assez discrets sur le sujet, tout en protestant périodiquement contre les installations de missiles à leur frontière en Roumanie et en Pologne, notamment. Les premières installations avaient été présentées par les états-uniens et leurs “alliés” de l’OTAN comme des missiles anti-missiles dirigés contre l’Iran ! Vous racontez celà à un cheval de bois, il vous flanquera des ruades !

Pour le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, l’intransigeance de la position américaine, due à l’incapacité de l’Occident à accepter «la réalité d’un monde multipolaire émergent» et son désir d’imposer sa volonté à la communauté internationale, fait peser des risques sur la sécurité du monde.

«Ce qui se passe est entièrement de la responsabilité de Washington», a accusé Sergueï Riabkov, affirmant être «inquiet pour le futur de la sécurité européenne et internationale». Moscou n’est qu’à moitié surprise par la tournure prise par les événements, car la situation actuelle s’inscrit dans une logique antérieure à l’arrivée au pouvoir de Donald Trump. «La réticence des Américains à entendre nos arguments et à mener des négociations de fond avec la Russie semble indiquer que la décision de rompre le traité avait déjà été prise il y a longtemps à Washington», a déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, le 1er février.

Et pour cause, dès 2015, la Russie avait fait part de son inquiétude après la publication d’un rapport du bureau du général Martin Dempsey, membre de l’état-major des armées des Etats-Unis.

Dans ce rapport, l’administration américaine faisait état de ses réflexions quant à la possibilité de déployer des missiles de portée intermédiaire en Europe et en Asie, qui seraient capable de détruire des cibles militaires sur le territoire de la Russie, en cas de dénonciation du traité INF. Le rapport mentionnait quatre types de missiles potentiels qui pourraient «aider à combler […] une lacune de capacités» due au traité.

Il était donc prévu que le traité serait rompu. Dès le 20 octobre 2018, lors de l’annonce du retrait américain, Donald Trump s’est empressé d’ajouter que les Etats-Unis allaient désormais «développer ces armes [nucléaires de portée intermédiaire]». Celles précisèment qu’il va nous faire payer à nous Européens !

Concrètement, et dans l’immédiat, les Russes ont évoqué les violations suivantes de la part des états-uniens :

– Les systèmes Aegis Ashore, anti-missiles soit-disant, mais en fait transformables en une heure en missiles d’attaques à décollage vertical comme les tomahwak, selon les spécialistes, sont le premier reproche des Russes. Ils estiment que la portée de ces missiles SM-3 Block IB installés en Roumanie est de 700 км à une vitesse de 3km/seconde et que les missiles SM-3 Block IIА encore au stade des essais et qui doivent être installés en Pologne ont une portée de 2.500 km à 4,5 км/seconde.

– Les Russes accusent aussi les Américains d’utiliser de plus en plus de drônes qui présentent toutes les caractéristiques d’un missile à courte ou moyenne portée. Ils ont aussi pointé des missiles présentés comme des “missiles cibles” pour la mise au point de système anti-missiles. Mais qui sont en fait des systèmes de lancement de missiles tomhawak.

– Plus grave, après l’annonce de la rupture par les USA, les services de renseignement russes ont sorti un dossier, selon lequel depuis deux ans déjà (2017), les états-uniens préparent la fabrication de nouveaux missiles de moyenne portée interdits par le traité dénoncé aujourd’hui, dans une usine Raytheon, à Tuson dans l’Arizona. Les services russes présentent des images sattelites à l’appui de leurs accusations.

Ракетный завод Тусон, США
Photo : Ministère de la défense de Russie
Les Russes y voient la preuve que les Etats-unis voulaient depuis au moins deux ans sortir du traité INF.

Démenti américain avec lequel les “alliés” de l’OTAN sont d’accord !

Les états-uniens démentent toute violation du traité. Mme Thomson a déclaré à la presse russe que la meilleure preuve en était que les autres membres de l’OTAN étaient d’accord avec cette affirmation !!! Selon les négociateurs russes, il n’y a même pas d’efforts diplomatiques des “partenaires” américains pour trouver un compromis afin de sauver le traité.

En réponse à l’ultimatum formel des états-uniens, les Russes ont aussi énoncé des conditions pour appliquer de nouveau le traité (les mesures miroirs de Poutine) :
– Supprimer les systèmes terrestres de lancement MK-41 qui peuvent être utilisés pour le tir de missiles Tomahwak

– Liquider les missiles pseudo-cibles qui sont en tous points semblables aux missiles ballistiques terre-terre de courte et moyenne portée.

– Supprimer les drônes identiques aux missiles interdits par le traité INF.

Les Russes disent attendre une réponse sans trop d’illusion.

Pour les Russes, il y a aussi des avantages à cette rupture

Ils n’ont pas trop d’inquiétude non plus quant aux conséquences de la rupture de ce traité. Et y voient même certains avantages !

Au niveau du danger immédiat d’agression des Etats-unis contre la Russie, il ne s’accroît pas du fait de la dénonciation de ce traité. Les Etats-unis disposent déjà de très nombreuses têtes nucléaires sur des sous-marins ou des bâteaux, sans parler des avions. Le traité INF ne portait que sur les installations terrestres. Bien sûr les nouveaux Pershings, plus puissants et rapides, sont plus dangereux mais les missiles déguisés et les drônes avec lesquels ils violaient le traité pouvaient leur permettre de lancer une attaque nucléaire. Or ils ne l’ont pas fait jusqu’à présent. La nouvelle situation ne change donc rien objectivement dans l’immédiat. Car la décision de lancer une attaque nucléaire est politique, pas militaire. Or la dissuasion fonctionne encore et se résoudre à attaquer en subissant une réponse foudroyante est une décision difficile à prendre. Et que le missile soit à courte ou à longue portée n’a que peu d’importance.

En revanche, le fait que le Traité ne portait que sur des installations terrestres désavantageait considérablement les Russes. C’est d’ailleurs pour celà que les Américains l’ont imposé et Gorbatchev l’avait accepté, sans peut-être s’en rendre compte. Car les Américains avaient beaucoup plus de bateaux que les Russes. Et pour ces derniers installer des missiles sur un camion ou sur un sous-marin représente une différence budgétaire considérable. Ils vont maintenant pouvoir installer leurs missiles de moyenne portée sur des camions…. Et celà grâce aux Américains !

La vérité est ailleurs… Anti-utopie militariste yankee

Bêtise des Yankees ? Pas sûr. Pour ces derniers l’important est ailleurs. Ces missiles ne menacent que les voisins de la Russie, donc le territoire US est à l’abri. Le but est d’autre part de soutirer de l’argent aux Européens et peut être aux Japonais et Coréens et autres asiatiques sous influence.

D’autre part, ce Traité est secondaire par rapport à la nouvelle tentation états-unienne de relancer la course aux armements (à la fois pour tenter de ruiner la Russie et de faire payer les Européens) et de contourner la dissuasion de l’adversaire et rendre possible l’utilisation de l’arme nucléaire en première frappe. Et là on touche à une sorte d’anti-utopie militaire et à la violation et sans doute la dénonciation d’un autre accord : celui sur la non prolifération des armes nucléaires d’attaque.

Selon les Russes et différents médias américains et anglais (Guardian et Business insider), les Etats-unis ont commencé à produire dans l’usine Pantax au Texas, de nouvelles têtes nucléaires, les W76-2, destinées aux missiles Trident, dénoncés déjà par les Russes comme contraires aux accords de désarmement. Le Pentagone explique que ces nouvelles têtes “ne présentent aucun danger et pourraient même baisser le seuil de danger de la menace nucléaire”.

Ces nouvelles têtes qui doivent entrer en service en septembre 2019, auront une charge nucléaire plus faible que ce qui se fait aujourd’hui, grâce à une diminution du nombre d’isotopes radioactifs. La puissance de la tête passe de 100 kilotonnes à 5 kilotonnes (1/3 de la bombe d’Hiroshima). Pourquoi ?

Première frappe à faible charge

L’administration Trump affirme que ces armes nucléaires à plus faible charge donne les moyens aux Etats-Unis d’agir avec plus de souplesse pour pratiquer leur dissuasion. Elle pense que en menaçant avec des armes nucléaires moins puissantes, elle rend ces menaces plus réelles car utilisables avec des dommages collatéraux plus réduits. Et au fond d’eux mêmes, les initiateurs de ces théories (et sans doute Trump lui-même qui demande publiquement pourquoi ne peut-on utiliser notre puissance nucléaire ?) pensent qu’en cas d’utilisation d’une telle offensive locale nucléaire “réduite”, les Russes n’oseraient pas répliquer à grande échelle et attaquer le territoire des Etats-unis !

Heureusement, aux Etats-unis même des oppositions semblent se manifester. Les experts et des ONG font valoir que l’adversaire ne peut savoir quelle puissance nuclaire lui est destinée et n’attendra pas de le savoir pour répliquer ! Plus susceptibles d’influencer des décisions : les démocrates opposants à Trump, mais volontiers russophobes, ont quand même des réticences devant la possibilité que ce nouveau programme de course aux armements nucléaires risque de coûter 1.000 milliards de dollars sur les dix ans à venir. C’est une hausse du budget de près d’un quart !

Pour Trump, le projet pour faire financer par les Européens les producteurs militaro-industriels américains devrait aider à convaincre. Ce n’est jamais exprimé comme ça bien sûr. Et il faudra encore qu’il arrive à en convaincre les démocrates. Actuellement, ces derniers estiment que l’addition est trop salée et injustifiée. La plupart estime qu’il n’y a pas d’arme nucléaire tactique. Elle est forcèment stratégique et implique donc forcèment une riposte.

La menace nucléaire pour nous tous réside dans le mouvement maintenant affirmé des autorités des Etats-unis vers une utilisation de l’arme nucléaire. Cette tendance se manifeste dans le renforcement de l’armement américain, l’augmentation vertigineuse du budget déjà colossal du Pentagone et de tout le secteur de la guerre, l’élargissement des systèmes de missiles anti-missiles, et maintenant l’introduction de nouveaux missiles de courte et moyenne portée.

Et ce qui rend les choses encore plus dangereuses, c’est que en accompagnement de cette course débridée aux armements et à la nouvelle doctrine de première frappe nucléaire, l’attitude économique, politique et diplomatique des Etats-unis ne pratique plus la négociation, la discussion ou la prise en compte des intérêts réciproques, encore moins le compromis mais recourt à la brutalité des menaces, de l’extraterritorialité juridique, du chantage et des sanctions et du mépris du droit international et du rôle de l’ONU. Pourtant c’est la véritable communauté internationale qu’ils sont si prompts à invoquer en évoquant leurs seuls obligés.

La véritable menace pour l’avenir vient de là.

Stoprussophobie février 2019