LA GUERRE EN UKRAINE : LES VÉRITABLES RAISONS DU CONFLIT DONBASS INSIDER (1/2)
LA GUERRE EN UKRAINE : LES VÉRITABLES RAISONS DU CONFLIT (DONBASS INSIDER)
Une analyse riche et complète qui devient un textye de référence pour qui veut vraiment comprendre la guerre otano-russe en territoire d’Ukraine. Merci à Donbass Insider pour ce texte remarquable
Il est facile et particulièrement commode pour les représentants de la société occidentale de se rassembler derrière les narratifs de l’OTAN sur les raisons de la guerre en Ukraine et de ne pas se mettre dans l’inconfort du doute et de la remise en question des postulats préétablis et dominant l’opinion public.
Pourtant, la sortie de cette zone de confort intellectuel qui n’est, en réalité, psychologiquement, qu’une zone de peur, est un exercice incontournable pour tous ceux qui privilégient la recherche de la vérité, qui, parfois, peut être bien différente des narratifs préétablis.
Par Oleg Nesterenko, président du commerce et d’Industrie Européen.
Dans cette analyse je n’entrerai pas dans les éléments historiques de chacun des belligérants, certes importants, qui ont mené vers la confrontation dans laquelle le monde se retrouve aujourd’hui, mais je parlerai du rôle réel sous-jacent et majeur de l’acteur-clé dans ce conflit : les États-Unis d’Amérique.
L’histoire nous démontre que, malgré les apparences, aucune guerre du passé n’a jamais eu une seule raison pour être déclenchée.
Chaque conflit majeur est basé sur un projet constitué de toute une multitude de raisons et de sous-objectifs à attendre dans le cadre d’un grand but ultime qui dépasse grandement, en général, le cadre de la guerre elle-même.
Les raisons-déclencheurs annoncées par les parties en confrontation ne sont que le reflet du point culminant, du haut de l’iceberg des divergences profondes qui, non seulement, ne peuvent plus être résolues par la voie diplomatique, mais, même au contraire, une solution diplomatique serait un obstacle à la réalisation des objectifs préétablis et soigneusement dissimulés.
L’instauration des démocraties
En terme général, les États-Unis d’Amérique et, auxiliairement, le monde dit occidental affirment que les conflits armés menés directement ou « orchestrés » par le monde de leur initiative ont pour raison l’instauration des états de droit, des libertés individuelles et collectives et de la lumière de la démocratie sur les territoires visés par la lutte face à la tyrannie, la dictature et la barbarie sanguinaires qui y résident.
En analysant l’intégralité de plus de cinquante guerres et intervenions armées menées depuis la fin de la seconde guerre mondiale, directement ou indirectement, par le bras armé des USA et/ou par procuration, via les pays satellites, et en analysant les résultats ultimes des hostilités on ne peut que faire un constat majeur :
– soit les États-Unis d’Amérique sont incroyablement mauvais dans la réalisation de leurs objectifs préétablis, car ils ne sont jamais atteints – pas une seule fois;
– soit, et pour être plus sérieux, les véritables raisons de la mise à feux et en cendres de parties du monde d’une manière discontinue ne sont pas tout à fait, ou, pour être plus précis, n’ont rien à avoir avec celles affichées.
Nul doute sur l’objectivité de ce constat, car il y a beaucoup trop de précédents de « réalisations », dont on connaît les résultats finaux. En ne mentionnant que les majeurs parmi elles, on peut citer les guerres en Corée et en Chine, au Guatemala, au Vietnam et au Cambodge, en Irak, en Bosnie et en Serbie, en Afghanistan, en Libye et en Syrie.
Sans parler de tant d’autres interventions américaines dans l’histoire contemporaine, y compris avec des bombardements directs de civils, comme à Cuba, au Congo, au Laos, à Grenade, au Liban, au Salvador, au Nicaragua, en Iran, au Panama, au Koweït, en Somalie, au Soudan, au Yémen et au Pakistan.
Et même cette liste n’est nullement exhaustive, car elle ne prend pas en compte tant d’opérations confidentielles menées de par le monde dans le but de « l’instauration des valeurs démocratiques et des droits de l’homme ».
L’observation de l’état général acquis par les sociétés visées, de leur qualité de vie avant et après les processus subis de la « démocratisation » ne peut laisser le spectateur que très perplexe.
La survie des États-Unis d’Amérique
En ne négligeant pas le fait que le peuple américain est un peuple fort sympathique et parfaitement amical en soi – ce qui ne peut nullement être nié par tous ceux qui ont eu l’expérience de relations et d’échange interpersonnel avec ses représentants et dont, pour ma part, j’ai la chance et l’honneur de côtoyer plus d’un de grand valeur humaine et vers qui j’éprouve de l’amitié et du respect profond – on ne peut, néanmoins, nier le fait que la liberté de pensée du peuple américain, dans sa majorité, est profondément soumise à la puissance de la propagande étatique, exercée depuis tant de décennies, via quasi l’intégralité des canaux de communication qui sont directement contrôlés par « l’état profond » américain et ses lobbies qui poursuivent les objectifs qui leur sont propres et ceci au nom de la nation américaine.
Les raisons tellement nobles des interventions armées des USA dans le monde, affichées auprès de la population américaine ne diffèrent, d’ailleurs, guère de celles affichées sur la scène internationale. Comme le disait en 1981 l’ancien directeur de la CIA William Casey : « Notre programme de désinformation aura atteint son but lorsque tout ce que le public américain croira sera faux ».
Contrairement à des narratifs développés par les antagonistes des États-Unis, pour cet « état profond » américain les véritables raisons des massacres répétés à grande échelle – il est difficile de nommer autrement le mode opératoire qui leur est propre – n’ont pas pour objectif ultime et fondamental la domination du monde, proprement dit.
Cette qualification n’est pas tout à fait précise. L’objectif final visé est bien plus pragmatique : la survie des États-Unis d’Amérique.
Non pas la survie tout court, en tant qu’une entité étatique, mais la survie des constructions permettant de réaliser des superprofits à des élites, d’une part, et, d’autre part, la survie de la mode et du niveau de vie acquis par le pays depuis la fin de la Grande dépression qui est arrivée à terme avec le déclenchement de la seconde guerre mondiale et la relance de l’économie américaine par l’industrie de guerre.
Cette survie n’est, tout simplement, pas envisageable sans la domination militaro-économique, ou, pour être plus précis, militaro-monétaire du monde. Et ce n’est nullement un hasard de l’histoire que le budget de guerre, dit de défense des États-Unis à lui seul est supérieur à 1/3 des dépenses mondiales dédiées à la défense – l’élément crucial dans le maintien de la domination monétaire à l’échelle mondiale.
Le concept de la survie par la domination mondiale a été clairement formulé à la fin de la guerre froide par Paul Wolfowitz, le sous-secrétaire américain à la Défense dans sa doctrine dit « de Wolfowitz » – qui considérait les USA comme la seule superpuissance restante au monde et dont l’objectif principal est de conserver ce statut: « empêcher la réémergence d’un nouveau rival, soit sur le territoire de l’ex-Union Soviétique, soit ailleurs, qui représente une menace de l’ordre de celle posée autrefois par l’Union Soviétique ».
Les principaux piliers-porteurs sous-jacents de la guerre en Ukraine
En mettant de côté les nobles narratifs adressés à la sensibilité psychologique des masses qui doivent exécuter le rôle qui leur est prescrit – l’approbation – voyons les réelles raisons, les principaux piliers-porteurs sous-jacents de la nouvelle guerre dans le cadre global de la survie des États-Unis d’Amérique – de la guerre en Ukraine.
Ses piliers-porteurs sont interdépendants et sont en nombre de trois :
– le maintien de la domination mondiale par le système monétaire américain,
– l’affaiblissement de l’économie de l’Union Européenne par le biais de la détérioration maximale des relations entre la Russie et l’Union Européenne,
– et l’affaiblissement significatif de la position de la Russie dans le cadre du futur conflit face à la Chine.
Tout autre élément de la guerre actuelle en Ukraine du côté américain, comme le lobbyisme de l’industrie de l’armement américain, la récupération des marchés énergétiques, la protection des importants acquis économiques américains sur le sol ukrainien, les schémas de corruption, le revanchisme personnel des « élites » américaines russophobes issues de l’immigration de l’Europe de l’Est et tant d’autres – ne sont que les compléments, les dérivés secondaires et les conséquences des trois raisons clés énumérées.
Le premier des trois piliers-porteurs sous-jacents de la guerre en Ukraine est le maintien de la domination mondiale par le système monétaire américain. Cette domination repose sur plusieurs éléments, dont les principaux sont l’extraterritorialité du droit américain, les bons du Trésor américain et le pétrodollar.
Il est totalement impossible ni de connaître, ni de comprendre les véritables raisons non seulement de la guerre en Ukraine, mais de la quasi-intégralité des guerres orchestrées ou menées directement pas les États-Unis d’Amérique, sans une vision précise des éléments mentionnés. Voyons-les donc en détail.
Le dollar et l’extraterritorialité du droit américain comme une arme de guerre économique
Le concept de l’extraterritorialité du droit américain est l’application du droit américain en-dehors des frontières des États-Unis, ce qui permet à des juges américains d’engager des poursuites judiciaires pour des faits qui ont eu lieu dans n’importe quel point dans le monde.
L’élément principal qui est utilisé comme prétexte aux engagements des poursuites est le fait de l’utilisation du dollar américain dans des transactions.
Ainsi, les mécanismes juridiques de l’extraterritorialité du droit américain procurent aux entreprises américaines un avantage concurrentiel majeur et totalement illégal, selon le droit international des affaires, mais bien légal selon le droit américain. Car, l’extraterritorialité du droit oblige les entreprises étrangères utilisant dans leurs transactions le dollar américain à se conformer aux standards américains, à se soumettre à la surveillance et au contrôle de l’état américain – ce qui rend possible l’espionnage « légalisé » de leur savoir-faire et de mener des actions d’entrave au développement des concurrents des entreprises américaines.
Dans les procédures de poursuite par le Département de Justice américain, les entreprises étrangères sont soumises à l’obligation de la régularisation de leur situation par l’acceptation d’une surveillance durant plusieurs années d’affilée, dans le cadre d’un « programme de conformité ».
En outre, en mettant artificiellement les entreprises étrangères, qui intéressent les groupes américains, en danger de paiement de très grosses amendes – on les mets en position de ne pas être hostile au rachat par les américains, afin de les éviter.
Afin d’asseoir sa domination mondiale, un nombre incalculable de poursuites est lancé sans aucun véritable fondement, dont le réel but est l’accès à l’information des concurrents et l’ingérence économique.
Les bons du Trésor américain et les pétrodollars
Dans la comptabilité il existe un terme comme les créances douteuses. Les bons du Trésor américain sont des titres obligataires qui s’achètent et se remboursent en dollars américains et qui sont, factuellement, les créances douteuses. Pourquoi ?
Aujourd’hui, la dette de l’état américain a dépassé les 31.000 milliards de dollars et continue à s’accroître au quotidien à la hauteur de plusieurs milliards par jour. Ce chiffre dépasse largement celui du PIB annuel des États-Unis et fait de la quasi-globalité des bons émis par le Trésor américain les titres à la solvabilité et valeur plus que douteuses, car remboursables par la monnaie nationale, dont pour la majorité émise il n’y a rien derrière. Rien de tangible. Sa solvabilité n’est garantie que par l’émission monétaire et la confiance accordée au dollar américain qui se base non pas sur sa valeur réelle, mais sur la domination militaire du monde par les États-Unis.
Et la Russie avec l’Ukraine dans tout cela ?
Depuis l’arrivée de Poutine au pouvoir, la Fédération de Russie a commencé le processus progressif de séparation des bons du Trésor américain. Depuis le 2014, le début du conflit instauré par les États-Unis en Ukraine par le coup d’état, la Russie s’est débarrassée de la quasi-intégralité de la dette américaine. Si en 2010 la Russie faisait partie des dix plus gros détenteurs de bons du Trésor américain, avec plus de 176 milliards USD, en 2015 elle en a détenu qu’à la hauteur d’environ 90 milliards, soit sa masse totale pratiquement divisée par deux en 5 ans. Aujourd’hui, la Russie ne détient que 2 milliards de cette dette, ce qui est une quantité dérisoire.
En tandem avec la Russie, la Chine de même, se débarrasse progressivement de ce dangereux débiteur. Si en 2015 elle a détenu des bons outre-Atlantique pour plus de 1270 milliards USD, aujourd’hui, c’est à la hauteur inférieure de 970 milliards, soit une baisse de ¼ en 7 ans. Aujourd’hui, la quantité de dette américaine détenue par la Chine est au plus bas depuis 12 ans.
Parallèlement au débarras des bons du Trésor américain, la Fédération de Russie a déclenché le processus progressif de la libération du monde du système des pétrodollars.
Une spirale vicieuse est déclenchée : l’ébranlement du système des pétrodollars porterait un coup significatif au marché des bons du Trésor américain. En effet, la baisse de la demande du dollar sur la scène internationale enclenchera automatiquement une dévaluation de la monnaie et, de fait, la baisse de la demande de bons du Trésor qui mènera, mécaniquement, à une augmentation de leur taux d’intérêt, en rendant tout simplement impossible le financement de la dette publique américaine au niveau que l’on connaît aujourd’hui.
Les détracteurs du postulat que la chute du dollar contre bon nombre de devises causera de très importants dommages à l’économie américaine stipulent qu’un dollar plus faible mènera vers une augmentation significative des exportations américaines, fera profiter les fabricants américains et, de fait, diminuera le déficit commercial des États-Unis.
S’ils ont tout-à-fait raison sur l’effet bénéfique de la dévaluation du dollar vis-à-vis des exportations américaines – ils ont parfaitement tort sur l’effet final inévitablement dévastateur sur l’économie américaine, car ils ne prennent pas en compte l’élément majeur : les États-Unis sont un pays qui se trouve depuis des décennies sur la voie de la désindustrialisation et l’effet positif sur les exportations ne sera que relativement négligeable face au déficit commercial gigantesque. Le déficit qui a déjà atteint en 2021 le niveau record de l’histoire des États-Unis et qu’avec une dévaluation du dollar, et donc l’augmentation du coût des importations à tous les niveaux, aura un effet destructeur. (NDLR de Stoprussophobie: à noter que les attaques contre l’approvisionnement énergétique à bon marché de l’Europe occidentale grâce aux fournitures russes et aux contrats longs, permettent d’envisager des déménagements d’entreprises européennes, surtout allemandes vers les Etats-unis. L’opération américaine de guerre en Ukraine n’épargne donc pas les “alliés” soumis)
Ainsi, régler le compte des deux fautifs de la situation – de la Russie et de la Chine – est donc l’élément clé dans la stratégie de survie des États-Unis d’Amérique.
Les pétrodollars
Avec l’effondrement, en 1971, des accords de Bretton Woods qui ont perduré depuis 1944, la dépendance mondiale vis-à-vis du dollar américain a commencé à diminuer très dangereusement pour l’économie des États-Unis et il leur fallait trouver un autre moyen pour augmenter la demande de la monnaie nationale.
Et c’est en 1979 que le « pétrodollar » est né dans le cadre de l’accord américano-saoudien de la coopération économique : « pétrole contre dollars ». Dans le cadre de cet accord l’Arabie Saoudite a pris des obligations de vendre son pétrole au reste du monde uniquement en dollar américain, ainsi que réinvestir ses réserves excédentaires en dollars dans des bons du Trésor américain et des entreprises américaines.
En contrepartie, les États-Unis ont pris des obligations militaires de garantir la sécurité de l’Arabie Saoudite.
Par la suite, cet accord « pétrole contre dollars » a été étendu à d’autres pays de l’OPEP et ceci est, d’ailleurs, sans aucune contrepartie de la part des américains, et a mené vers une émission exponentielle du billet vert. Progressivement, le dollar américain est devenu la monnaie d’échange de référence pour d’autres matières premières et, de ce fait, la monnaie de réserve mondiale – ce qui a procuré aux États-Unis une suprématie sans égale et des privilèges exorbitants.
Aujourd’hui, on observe une rupture stratégique entre les États-Unis et l’Arabie Saoudite qui est due à plusieurs facteurs majeurs. On peut citer une très importante réduction des importations de pétrole brut par les États-Unis, dont l’Arabie était le plus grand fournisseur ; le retrait du soutien américain à l’Arabie Saoudite dans la guerre du Yémen et l’intention du président américain Joe Biden de sauver l’accord nucléaire avec les mollahs chiites d’Iran – ennemi juré des saoudites sunnites.
Le Royaume a très mal vécu cette triple « trahison » des américains. Le grand désaccord entre les deux pays est arrivé au point culminant avec le déclenchement de la guerre en Ukraine, quand le pouvoir saoudite été mis devant un choix existentiel : continuer à évoluer dans le sillage des États-Unis ou rejoindre le camp de leurs adversaires majeurs qui sont la Chine et la Russie. C’est la seconde solution qui a été retenue.
Face à l’Amérique qui a négligé les intérêts stratégiques des saoudites, la Chine, tout au contraire, n’a fait que croître sa coopération avec l’Arabie Saoudite. Et cette relation bilatérale ne se limite pas qu’au secteur des énergies fossiles, mais s’élargit grandement dans le domaine des infrastructures, de commerce et d’investissement. Non seulement les importants investissements chinois en Arabie sont en croissance constante et la Chine rachète aujourd’hui près d’un quart des exportations mondiales de pétrole du Royaume, mais, en contrepartie, le Fonds Souverain du Royaume envisage de commencer à réaliser d’importants investissements dans des entreprises chinoises de secteurs stratégiques.
Parallèlement, un accord de coopération militaire entre le Royaume saoudien et la Fédération de Russie a été signé au mois d’août 2021.
De même qu’entre la Russie et la Chine, l’Arabie Saoudite a pris le chemin de la dédollarisation des échanges et des investissements dans ses relations avec les Chinois.
Les actions conjointes et synchronisées de la Russie, de la Chine et des pays de l’OPEP sur le chemin de la dédollarisation progressive ont pris de l’ampleur avec le déclenchement de la guerre en Ukraine qui a fait sauter les masques et auront, à terme, un effet d’avalanche quasi inévitable vis-à-vis de la domination monétaire américaine, car les banques centrales de nombreux pays sont incitées à repenser la logique de l’accumulation de réserves, ainsi que du bien-fondé d’investissement dans des obligations du Trésor américain.
Déclaration de guerre
La guerre sur le territoire de l’Ukraine contre la Russie et la future guerre imminente qui se prépare dans l’Asie Pacifique contre la Chine ne sont rien d’autre qu’une partie de la réaction des États-Unis qui considèrent l’action de la Russie et de la Chine contre la domination mondiale de la monnaie américaine comme une véritable déclaration de guerre.
Et les États-Unis ont parfaitement raison de prendre cette déclaration plus qu’au sérieux, car la revente massive des bons de trésor américain jumelée avec la destitution progressive du système des pétrodollars par les puissances telles que la Russie et la Chine n’est rien d’autre que le début de la fin de l’économie américaine, telle qu’on la connaît depuis la fin de la seconde guerre mondiale – début de la fin des États-Unis, tels qu’on les connaît aujourd’hui.
Les pays qui ont osé par le passé mettre en danger la domination mondiale par le système monétaire américain ont payé leur audace avec un prix on ne peut plus radical.
Sauf que la Fédération de Russie, de même que la République Populaire de Chine, sont des puissances militaires qui ne peuvent, en aucun cas, être attaquées directement – ce qui vaut le suicide. Seules les guerres par procuration et les guerres hybrides peuvent être menées contre la puissance russe et la puissance chinoise.
Aujourd’hui nous sommes dans la « phase russe », demain nous serons dans la « phase chinoise ».
Il est important de souligner que la guerre en Ukraine n’est nullement la première, mais la troisième grande guerre du dollar américain, sans compter deux guerres « froides » de la monnaie américaine.
Quelles sont ces guerres, hormis celle qu’on connait aujourd’hui ?
Ce sont la guerre d’Irak et la guerre de Libye. Et les deux guerres « froides » du dollar sont les guerres contre l’Iran et contre le Venezuela.
La première grande guerre du dollar
En parlant de la première guerre du dollar qui est la guerre d’Irak, il faut mettre de côté la fameuse fiole d’anthrax imaginaire que le secrétaire d’État américain Colin Powell a brandi à l’ONU, le 5 février 2003, afin de détruire le pays et de massacrer le peuple irakien, et de rappeler les faits. Les faits qui sont très éloignés de la fantaisie américaine.
Au mois d’octobre de l’an 2000, le président irakien Saddam Hussein a fait une déclaration qu’il ne souhaite plus vendre son pétrole contre les dollars américains, mais uniquement contre les euros.
Une telle déclaration valait la signature de son arrêt de mort.
Selon une étude poussée de American Civil Liberties Union et du Fond américain de l’indépendance du journalisme, qu’entre 2001 et 2003 le gouvernement américain a fait 935 déclarations mensongères concernant l’Irak, dont 260 directement par George W. Bush. Et parmi les 260 déclarations du mensonge prémédité du président américain, 232 ont été sur la présence en Irak d’armes de destruction massive inexistantes.
La fiole de Colin Powell, après 254 déclarations mensongères de ce dernier du même propos, n’a été que le point culminant d’une longue et laborieuse préparation de l’opinion publique nationale et internationale en vue d’un imminent déclenchement de l’extermination de la menace irakienne portée à la monnaie américaine.
Et, lorsqu’en février 2003, Saddam Hussein met sa « menace » à exécution en vendant plus de 3 milliards de barils de pétrole brut pour le montant de 26 milliards d’euros – un mois plus tard, les États-Unis procèdent à l’invasion et la destruction totale de l’Irak, dont on connaît les conséquences tragiques avec l’anéantissement de l’intégralité de l’infrastructure du pays et tant de morts parmi la population civile.
Même à ce jour, les États-Unis affirment fermement que cette guerre n’a strictement rien à avoir avec la volonté de l’Irak de s’affranchir du système des pétrodollars. Vu l’impunité judiciaire la plus totale des crimes contre l’humanité commis par les gouvernements successifs des États-Unis, ils ne se donnent même pas la peine de les couvrir par des récits ne serait-ce que peu crédibles aux yeux de la communauté internationale.
Les faits sont parfaitement connus et on pourrait s’en arrêter là. Mais, pour que le procédé de « défense » des intérêts américains, dont l’actuelle guerre en Ukraine soit encore plus claire, parlons également de l’avant-dernière – seconde grande guerre du dollar qui est la guerre de Libye.
La seconde grande guerre du dollar
Six années se sont écoulées depuis l’anéantissement de la menace irakienne – une nouvelle menace existentielle pour le dollar américain est apparu en la personne de celui qui a refusé de tirer la leçon du destin tragique de Saddam Hossein : Mouammar Kadafi.
En 2009, alors à la présidence de l’Union Africaine, Mouammar Kadafi propose aux États du continent africain une véritable révolution monétaire qui avait toutes les chances de réussir pour changer le destin du continent et qui été accueilli avec un grand enthousiasme : se soustraire de la domination du dollar américain en créant une union monétaire africaine dans laquelle les exportations du pétrole et autres ressources naturelles africaines soient payées principalement par le dinar-or – une nouvelle monnaie à créer et qui serait fondée sur les actifs financiers et les réserves d’or des fonds souverains du continent.
Suivant l’exemple des pays arabes de l’OPEP ayant leurs propres fonds souverains pétroliers, d’autres pays africains producteurs de pétrole, commençant par les géants pétroliers et gaziers l’Angola et le Nigeria, ont lancé des processus de la création de leurs propres fonds nationaux constitués des revenus tirés des exportations pétrolières. En tout, 28 nations productrices de pétrole et de gaz africains étaient parties prenantes du projet.
Kadhafi, pourtant, a commis une erreur stratégique de calcul qui a non seulement « enterré » le dinar-or, mais également lui a coûté la vie.
Il a sous-estimé le fait qu’il était totalement exclu que ce projet se réalise, d’une part, pour l’État américain et, d’autre part, pour « l’état profond » de Wall Street et de la City de Londres.
Car, non seulement il mettait en danger existentiel la monnaie américaine, mais, en plus, privait les banques new-yorkaises et de la City du brossage habituel de trillions de dollars provenant des exportations de matières premières du continent africain. Le Royaume-Uni était donc en parfaite symbiose avec les États-Unis dans sa volonté de destruction du pouvoir-auteur de la menace.
Dès la prise de décision par des « alliés » sur la neutralisation de la nouvelle menace – ils ne se soucièrent guère du drôle de timing pour être une coïncidence aux yeux des observateurs : plus de 40 ans d’inaction face à Kadhafi, arrivé au pouvoir en 1969, et, dès qu’il expose à l’Union Africaine le projet de cette révolution monétaire – une nouvelle guerre civile orchestrée par les États-Unis se déclenche de suite.
En ayant déjà dans le passif l’invasion criminelle et la destruction de l’Irak basées sur de grossiers mensonges prémédités que l’état américain a proliféré à l’ONU en 2003 via Colin Powell sur les soi-disant armes de destruction massive détenues par Saddam Hussein, les États-Unis ne pouvaient plus se permettre de réutiliser la même technique et ont été obligés de diversifier la mise en place de l’invasion, afin de ne pas se mettre, une fois de plus, en position de criminels de guerre.
Soit, au moment quand ce nouveau « printemps arabe » est arrivé au point d’être écrasé par le pouvoir de l’état libyen – les américains, en restant dans l’ombre, utilisent les pays satellites et vassaux – la France, le Royaume-Uni et le Liban – pour déterrer de l’oubli une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies contre la Libye datée de 1973 – vieille de plus de 35 ans – pour attaquer et détruire le pays.
La réalisation été faite en violant même leur propre résolution nouvellement adoptée : au lieu de l’instauration d’une zone d’exclusion aérienne au-dessus de la Libye prévue par la résolution, ce sont les bombardements directs des objectifs militaires au sol qui ont eu lieu. Ces bombardements ont été totalement illicites et en totale violation du droit international, car ceux qui ont voté pour l’adaptation de la résolution l’ont fait étant rassurés par les auteurs que l’objectif de l’action n’est que l’instauration d’une zone d’exclusion aérienne protégeant les civils et nullement la défaite de Kadhafi, ni la destruction de son armée.
C’est-à-dire que les États-Unis, sous la couverture de ses pays-satellites, ont directement menti à l’ONU, une fois de plus, afin d’avoir une moindre base légale pour déclencher les hostilités et de faire par la suite ce qui était prévu d’avance : anéantir la nouvelle menace au dollar américain.
Que ce sont les États-Unis et personne d’autre qui sont les réels auteurs de la destruction de la Libye en 2011 était un secret de polichinelle.
Et, à partir de la publication par Wikileaks de la correspondance du 2 avril 2011 entre l’ancienne secrétaire d’État américaine Hillary Clinton et son conseiller Sid Blumenthal sur le sujet, le « secret » est sorti de l’ombre : Clinton était l’élément-clé de la conspiration occidentale contre le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi et, plus précisément, contre la nouvelle monnaie panafricaine – menace directe au dollar américain.
Blumenthal écrit à Clinton : « Selon les informations sensibles disponibles par cette source, le gouvernement de Kadhafi détient 143 tonnes d’or, et un montant similaire en argent… Cet or a été accumulé avant le courant de rébellion et était destiné à être utilisé pour établir une monnaie panafricaine basée sur le dinar-or libyen ».
Comme je l’ai mentionné auparavant, aucune guerre n’a jamais une seule raison pour être lancée. Dans le cas de la guerre contre Kadhafi cela a été de même : une des raisons-clés complémentaires était l’intérêt personnel de Hillary Rodham Clinton de jouer le rôle de « dame de fer » dans le milieu politique américain, en vue des futures élections présidentielles. Ceci était comme dire à son parti politique : « regardez : j’ai été capable d’écraser tout un pays. Ne doutez donc pas que je suis bien en capacité de mener le combat électoral ». En avril 2015 elle annonce sa candidature à la présidence et, en juillet 2016, elle est officiellement désignée comme candidate du Parti démocrate.
Dans la seconde grande guerre du dollar ce n’est pas que l’avenir de la Libye, mais l’avenir de tout le continent africain qui était mis sur l’hôtel du sacrifice pour le bien-être de l’économie américaine.
Tous ceux qui essaient de mettre en danger le système monétaire américain – doivent disparaître, s’ils ne sont pas de taille à résister.
Néanmoins, si c’est un pays puissant qui est en cause et que l’on n’est pas en mesure de l’écraser directement, comme l’Irak et la Libye, ce sont des attaques indirectes multimodales d’envergure qui sont élaborées et lancées, restant toujours dans l’ombre, faisant passer l’agressé pour l’agresseur, dans le but d’affaiblir l’adversaire au point qu’il abandonne ses projets de « destitution » du dollar et soit obligé de se concentrer sur la résolution de problèmes nouvellement apparus.
Après la fin de la guerre en Ukraine – la troisième grande guerre du dollar américain, c’est inévitablement la quatrième grande guerre du dollar – la guerre de Chine – qui aura lieu et dont on ignore encore quelle forme précise elle prendra.
Le second des trois piliers-porteurs sous-jacents de la guerre en Ukraine est l’affaiblissement de l’économie de l’Union Européenne par le biais de la détérioration maximale des relations entre la Russie et l’Union Européenne.