Magnitsky: l’affaire prétexte à sanctions anti-russes

  • stoprussophobie redaction
  • lundi juin 19, 2017
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Magnitsky: l’affaire prétexte à sanctions anti-russes

Le premier prétexte à la politique états-unienne de sanctions anti-russes

En juin 2017, le Sénat américain souhaitait introduire de nouvelles sanctions contre la Russie. Sans qu’aucun élément nouveau ne soit intervenu sur la scène internationale ou géopolitique. Bien sûr, ces nouvelles sanctions portent essentiellement sur la fourniture de gaz à l’ouest de l’Europe et l’on voit se profiler la volonté des Américains de nous vendre leur gaz de schistes en interdisant la fourniture de gaz de proximité de Russie.

Mais en arrière fond, cette nouvelle offensive anti-russe aux dépends de l’Europe occidentale, montre bien que la politique de sanctions a été une politique décidée depuis quelques années qui ne cherchait que des prétextes pour s’appliquer. L’Ukraine, la Crimée, le Boeing malaisien, voire la Syrie évoqués à tour de rôle ou ensemble ne sont que les provocations ou prétextes à instaurer ces mesures. Ce qui nous concerne dans l’affaire, c’est qu’on nous oblige à suivre. Contre nos intérêts.

Cette politique de «sanctions» a été inaugurée avant même l’affaire ukrainienne par l’affaire dite Magnitsky, du nom d’un comptable-auditeur décédé en prison en Russie à la suite d’une vaste affaire de fraude fiscale présumée qui fut présentée comme « politique ». Toute la supercherie de cette affaire, premier prétexte, a été mise en évidence d’une manière assez inattendue par la tentative d’un réalisateur russe anti-gouvernemental de faire un film sur commande pour défendre la thèse états-unienne sur l’affaire. Or l’homme s’est avéré être honnête. Il s’est aperçu qu’on lui racontait des galéjades. Des grosses et sordides. Voilà l’histoire.

Le cinéaste Andreï Nekrassov

Jusqu’alors en vogue dans le cercle des anti-Poutine actifs, leréalisateurrusseAndreï Nekrassov risque d’être bientôt classé du mauvais côté de la barrière.Cecinéasted’opposition, vivant à l’étranger, a décidé, il y a trois ans, de commencer un film sur l’affaire Magnitsky, cet expert-comptablede Hermitage capital (société de fonds d’investissement), société dirigée par BillBrowder.

La version qui, jusque-là, avait les faveurs médiatiquesde la presse occidentale,est que Magnitsky est mort car il a découvert des malversations faites par le pouvoir russe et a été tué en prison sans recevoir de soins. Cette version a servi de fondement à la mise en place de la première “Liste”, regroupant les personnalités russes que l’Occident “ne peut fréquenter sans se salir”.

C’est dans cet état d’esprit que A. Nekrassov, encouragé par M. Browder et d’autres, a commencé son reportage, persuadé de l’intégrité de Browder. Mais il le termine en démontant totalement la version “officielle” occidentale. Il démontre l’impossibilité de la position de B. Browder sur le fond et, en fait, disculpe la Russie.

Finalement, son documentaire, trois ans de travail, est interdit de projection au Parlement européen et Arte le déprogramme sine die.

Cf. l’excellent article de Karine Bechet Golovkohttp://russiepolitics.blogspot.fr/2016/05/arte-censure-un-film-russe-dopposition.html

La toile de fond

C’est en2012 que l’«Affaire Magnitsky»ressurgit en Russie et vient très vite au devant de la scène internationale. A partir de ce moment, s’amorce une nouvelle spirale de la tension entre le Russie et la fameuse « communauté internationale » qui comprendles pays membres de l’OTAN+ le Japon et l’Australie.

Sergueï Magnitsky, présenté souvent à tort comme juriste mais en fait comptable-auditeur, avait travaillé au sein d’une compagnie de consulting en impôt et finance : «Firestone Duncan». Son client permanent était alors le fond «Hermitage Capital Management». Décédé le 16 novembre de 2009 en prison, il est l’objet de diverses spéculations quant aux causes de sa mort, sujette à controverse.

Prétextant une riposte, le Congrès de États-Unis avait alors introduit des sanctions économiques et des interdictions de séjour pour dix-huit fonctionnaires russes, soupçonnés d’être impliqués dans cette mort en 2012. Londres avait également mis sur une liste noire 60 fonctionnaires russes. Toute l’investigation présentée devant le parlement américain se basait sur les affirmations d’un seul homme : Bill (ou plus officiellement William) Browder – homme d’affaires américain, ancien employeur du défunt Magnitsky.

Bill Browder s’était illustré en tant «qu’investisseur» en Russie depuis 1998. Il était connu dans les milieux d’affaires comme un homme désagréable, méprisant, agressif et querelleur, autant avec ses collègues qu’avec ses clients. Il détient probablement l’un des plus spectaculaires palmarès d’affaires judiciaires initiées contre des compagnies. Des compagnies où il investissait lui-même. A titre d’exemple, en 2002 M. Browder avait entamé 12 poursuites contre la Sberbank, protestant contre des émissions d’actions qu’ils considérait comme nuisibles pour son portefeuille.

Il fut soupçonné de fraude fiscale à plusieurs reprises, puis accusé en juillet 2013 pour des délits commis en 2001, l’instruction ayant été ouverte en 2004. Une instruction contre Browder, liée à un autre épisode de fraude fiscale reste actuellement en cours à Moscou. Il fut déclaré persona-non-grata en Russie en 2005. Magnitsky, quant à lui, fut arrêté en 2008, après « l’exfiltration» organisée par Browder pour presque tout son personnel.

Cette affaire de fraudeprésuméeà grande échelle, impliquant de nombreuses personnes se transforma en un véritable règlement de comptes mafieux : plusieurs morts apparemment criminelles furent à déplorer. Alors qu’un spécialiste de l’optimisation fiscale,Octaï Gasanov, décède d’une crise cardiaque en octobre 2007, Valery Kourotchkine trouve la mort, empoisonné par l’ alcool (le directeur fictif de «Riland»). Puis Semen Korobeinikov (propriétaire d’une des structures financières mêlées à cette affaire) tombe d’une maison en construction en septembre 2008. Après la mort mondialement connue de Magnitsky en prisonle 16 novembre 2009, c’est au tour d’Alexander Perepilichny, l’ancien propriétaire de «Financial Bridge company», informateur de Bill Browder,trouvé mort empoisonné en Angleterre où il avait fui quelques années auparavant. Si on souhaite vivre longtemps,il semblerait qu’il vautmieux éviter ded’avoir été lié aux affaires deBill Browder !

Concernant la mort de Magnitsky, le témoignage d’un codétenu, Oleg Lourier, mérite un détour. Lourier avait eu deux fois l’occasion de parler en privé avec Sergueï Magnitsky en prison en 2009. Son témoignage fut livré sous serment aux Etat-Unis, lors d’une affaire de plus, initiée d’ailleurs par Browder, recyclé de nos jours en «activiste des droits de l’homme» et en justicier. Oleg Lourier insiste sur le fait qu’en 2009, Magnitsky avait eu l’espoir que son ancien patron le fasse sortir en échange d’une discrétion garantie. Dix jours plus tard, Magnitsky aurait déclaré à Lourier : «pour mes anciens employeurs, il faut que je ne sois pas libéré mais mort»

Aujourd’hui, le couac

Il est facile de deviner qu’un tel imbroglio constituera le point de départ rêvé pour une campagne anti-Kremlin bien musclée, sous réserve qu’on sache n’en raconter que des morceaux choisis. Une occasion rêvée pour la chaîne Arte (associée pour l’occasion à deux chaînes norvégiennes) qui s’empressa de trouver un cinéaste russe estampillé 100% opposition et figurant probablement à ce moment là dans les petits papiers d’illustres pourfendeurs mondains du pouvoir russe en France.

Andreï Nekrassov fut ce volontaire, considéré comme acquis à la cause. Ce cinéaste russe a séjourné plus d’une décennie à l’étranger et a dirigé la réalisation de plusieurs films primés:

  • Prix de l’Unesco au Festival de Cannes, 1993 (Springing Lenin)

  • Prix de la FIPRESCI au Festival de Mannheim-Heidelberg, 1997 (L’Amour est aussi fort que la mort)

  • Prix spécial du jury au Festival Kinotavr, 1997 (L’Amour est aussi fort que la mort)

  • Prix spécial du jury au Festival de cinéma russe de Moscou, 2001 (Amour et autres cauchemars)

  • Prix du meilleur documentaire au Festival de Karachi, 2004 (Méfiance)

Nekrassov est un opposant connu et très actif contre le pouvoir russe, ayant jusqu’alors produit par ailleurs d’autres films et documentaires, imprégnés d’un parti pris plus que prononcé et comportant beaucoup de suppositions et analyses très orientées contre le pouvoir. On ne s’étonnera donc pas que jusqu’alors ses œuvres aient attiré une critique favorable du côté de la presse dite «internationale». Pour la même raison, les médias russespro-otandits «libéraux» (*) étaient admiratifs à l’égard de Nekrassov.

Pourtant, cette opinion s’est inversée après l’achèvement du nouveau film :The Magnitsky Act — Behind The Scenes(“La loi Magnitsky. Les coulisses”)

* Le terme «libéral», lorsqu’il est utilisé en Russie, aurait plutôt comme équivalent en France : atlantiste pro-otanien, maniant à souhait le pro-atlantisme et l’anti patriotisme systématique.

«Je te connais par ton film sur Litvinenko. Tu es des nôtres», lui lançait Bill Browder lors d’une première interview en 2010, «parce que toi et moi nous avons l’identité politique absolue, je respecte tes films et ton courage pour critiquer le dictateur (NDLR: Poutine)»

Ainsi, Nekrassov avait au départconstruitson scénario en se basant exclusivement sur les paroles de Browder. Tout est alors encore clair pour Andrei Nekrassov: le régime est sanglant, le défenseur des droits de l’Homme – Browder est héroïque. La «reconstitution» est filmée, Nekrassov procède au montage. Lors de ce travail il commence enfin à lire des documents originaux et à poser des questions. Browder prend cela très mal, il interrompt toute relation.

Nekrassov procède alors à sa propre enquête et le concept du film est changé : Ce n’est plus un film sur la mort tragique d’un hérosMagnitsky, mais sur les actions de structures dignes d’une mafia internationale exploitant dans ses intérêts les rivalités politiques internationales. N’hésitant pas à se déplacer en Europe, aux Etats-Unis et en Russie auprès des divers protagonistes pour révéler audacieusement les supercheries grossières du dossier construit par Browder.

Nekrassov démonte une par une toutes les accusations portées à l’encontre des fonctionnaires russes désignés. Furieux, Browder intervient lors de la première pour empêcher la projection du film au Parlement européen. Chose incroyable, les avocats de Bill Browder ont plus de pouvoir que des organes représentatifs de l’Union Européenne. Le film est déprogrammé. Plusieurs chaînes de télévision avaient investi dans ce film : Non seulement Arte mais aussi NRK et NFI, en Norvège.

Arte a bien entendu emboîté le pas en déprogrammant la diffusion prévue le 3 mai, ce qui n’est guère surprenant au vu de sa ligne éditoriale habituelle et de ceux de certains de ses actionnaires.

Personne ne sait si tous les tenants de cette affaire de fraudes, d’escroqueries et de crimes où Bill Browder est sérieusement impliqué seront tous vraiment et clairement éclaircis un jour. Souhaitons le vivement ! Personne ne sait si l’initiative de la «liste de Magnitsky» a été exclusivement prise sous l’influence de Browder. Son portefeuille et surtout son orgueil démesuré ont été touchés au point de la motiver à l’extrême, mais il peut avoir simplement bénéficié du climat anti-russe en vogue aux USA contre la Russie. Une sorte d’action commune avec prétexte tout trouvé, où chacun trouve ses intérêts. Et à voir la suite, le premier prétexte à une politique offensive pour soumettre la Russie ou l’empêcher d’avoir des velléités de souveraineté indépendante. Ce qui explique la politique des « sanctions ». Le terme lui même étant tout un programme !

Et à présent ?

Le cinéaste Nekrassov pourra-t-il encore obtenir quelques prix et surtout des financements pour ses nouveaux documentaires auprès d’organismes européens ? On peut supposer que non. Mais désormais sa vie a changéde sens. Il n’hésite pas à déclarer :«L’histoire de Magnitsky, selon la version de Browder, est un fake absolu, c’est clair pour moi. Je ne vais plusconsacrer mon travail auxmythes à propos d’un Magnitsky lanceur d’alerte. Il n’y a qu’une chose que je n’ai pas comprise : Où est passé le quart de million volé ? Parce qu’il n’a pas été transmisoù Browder l’indique. La mort de Magnitsky a été avantageuse exclusivement pour Browder, mais ce fait, même évident, ne suffit pas pour l’accuser de ce meurtre.

Des questions demeurent et je vais les poser dans le film que jesuisen train de tourner à présent. La suite de ce travail consiste à monter ce que nous avons filmé pendant des projections, des interviews et des discussions après visionnage de la version précédente. Un film sur les conséquences du premier film, le but étant de mettre à jour les abcès de la vie sociale, les processus invisibles et dangereux pour la société. Ils ont été mis en évidence par le scandale attisé autour de mon film par Browder et par certains médias russes, prétendus acteurs d’opposition.

Pourquoi l’opposition s’attribuerait-elle le droit exclusif de décider où est le bon et où est le mal ? A mon avis, derrière la haine de cette opposition envers le régime un autre et bien plus sérieux problème se cache: ces opposants considèrent consciemment ou pas le peuple russe comme le mal principal». Qu’on ne s’étonne pas de la dureté de l’accusation : Les articles pondus par certains journalistes bien connus dans le microcosme libéral-libertaire russe relèvent vraiment du dénigrement du peuple lui-même.

Il y a deux-trois ans, après son film sur la mort du transfuge Litvinenko, Nekrassov lui-même, accusait le peuple russe de s’être trompé et exprimait l’espoir qu’un jour il compromettrait le président Poutine en dénichant quelque chose de bien sale. Aujourd’hui, il déclare qu’il va faire un film sur la position de l’intelligentsia dite libérale:

«La position de l’intelligentsia libérale est que celle-ci se considère comme le bien absolu alors que le peuple serait le mal absolu. Et cela a été montré dans l’histoire de Magnitsky : selon ces opposants ce sont des «sales flics» qui se sont permis de faire quelques chose de lâche et vil, pas un homme d’affaires occidental malin.Pourquoi donc croient-ilscet affairiste de finance mais pas leurs compatriotes ! Ce sera un film de réflexion sur mon expérience acquise lors du travail sur le film de l’affaire Magnitsky et sur la façon dont on se retrouve face à un mur de préjugés lors d’une telle enquête».

Vincent Parlier

Pour en savoir plus encore :

http://russiepolitics.blogspot.fr/2016/05/arte-censure-un-film-russe-dopposition.htmlhttps://marknesop.wordpress.com/2011/01/19/sergei-magnitsky-bill-browder-hermitage-capital-management-and-wondrous-metamorphoses/

Sergei Magnitsky, Bill Browder, Hermitage Capital Management and Wondrous Metamorphoses

Firestone duncan

16.09.2009Тверской райсуд Москвы продлил на два месяца — до 15 ноября — срок содержания под стражей управляющему партнеру аудиторской компании Firestone Duncan Сергею Магнитскому, обвиняемому в содействии инвестиционному фонду Hermitage Capital в уклонении от уплаты налогов на 100 млн руб.

Karpov contre Browder № HQ12DO3133 и HQ12DO1742, Royal Courts of Justice, Strand, London, WC2A 2LL, 14/10/2013

Affaire Magnitski : l’histoire sordide d’un machiavélisme d’Etat

ОТЧЁТ ОБЩЕСТВЕННОЙ НАБЛЮДАТЕЛЬНОЙ КОМИССИИ ПО ОСУЩЕСТВЛЕНИЮ ОБЩЕСТВЕННОГО КОНТРОЛЯ ЗА ОБЕСПЕЧЕНИЕМ ПРАВ ЧЕЛОВЕКА В МЕСТАХ ПРИНУДИТЕЛЬНОГО СОДЕРЖАНИЯ Г МОСКВЫ О ПРОВЕРКЕ СОДЕРЖАНИЯ Л МАГНИТСКОГО В СИЗО Г МОСКВЫ

Постановление от 31 мая 2011 г. по делу № А41-8992/2009

Куратор дела Магнитского раскрывает детали расследования 07.06.2010

В эксклюзивном интервью “Бизнес ФМ” бывший заместитель главы Следственного комитета при МВД, а ныне руководитель правового управления Генеральной прокуратуры Олег Логунов.

20.05.2008 Письмо в совет при президенте Российской Федерации по противодействии коррупции

Magnitsky’s Testimonies against Corrupt Officers

Affaire Magnitski: William Browder, le pire ennemi du Kremlin

Grégoire Fleurot — 01.03.2013

Плохие парни: почему в истории Сергея Магнитского нет положительных героев

Андрей Некрасов о скандале вокруг своего фильма, реакции на него в Москве и своих творческих планах

Диалоги с Сергеем Магнитским. Бутырка. 2009 год (November 9th, 2015)

20.02.2017В рамках данного дела Браудеру инкриминируют совершение двух преступных действий: организацию преднамеренного банкротства компании «Дальняя степь» (она была ликвидирована по решению арбитражного суда в 2006 году) и уклонение этой фирмой от уплаты налогов в 1996-2005 годах (ст. 33, ст. 196 и 199 УК РФ) на сумму около 3,3 млрд рублей.