“Sanctions” US : La réponse russe subtile du faible au fort

  • stoprussophobie redaction
  • dimanche août 6, 2017
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“Sanctions” US : La réponse russe subtile du faible au fort

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La réaction russe à l’annonce des “sanctions” US est subtile mais relève d’une tactique du faible au fort

 
La façon dont a été annoncée la “réponse” russe aux “sanctions” américaines renforcées contre la Russie, et par ricochet contre l’Union européenne, a eu de quoi surprendre. D’abord parcequ’elle est intervenue avant même que le président Donald Trump ne l’ait validée. Même si celà ne faisait guère de doutes. Trump s’est désormais placé hors jeu en matière de relations internationales des Etats-Unis, comme nous l’avions prévu sur stoprussophobie. Il n’empêche qu’en matière diplomatique la forme a son importance. Et politiquement, s’il s’agissait réellement de prendre des mesures contre les nouvelles lois russophobes, en cours de ratification, il aurait mieux valu sans doute ne pas contrarier le président de la partie adverse, si on suppose qu’il lui reste une once de pouvoir. D’autant qu’aucun nouveau développement, en dehors des campagnes médiatiques anti-russes fabriquées aux Etats-unis, précisèment contre le président appelé à ratifier cette véritable euthanasie politique, n’est intervenu sur la scène internationale.   
 
Les Russes font généralement attention à ce genre de choses. Donc il faut chercher ailleurs
 
Rien d’étonnant non plus que les médias occidentaux présentent les décisions presque uniquement comme une réduction de 755 personnes du personnel diplomatique américain à Moscou  ! En oubliant souvent de préciser (mais pas toujours cette fois) que la mesure russe exige seulement un équilibre de la présence diplomatique des deux pays à 455 personnes de chaque coté. On peut se demander légitimement  comment il se fait que les Américains avaient besoin de 755 personnes à statut diplomatique ou assimilé de plus que les Russes aux Etats-unis… Alors que ce sont les Russes qui sont accusés à longueur de médias US de pseudos ingérences dans les affaires américaines… De plus, bien sûr, nos médias oublient de rappeler que lorsque l’administration Obama a expulsé 35 diplomates russes, en décembre dernier, et s’est emparé de deux villas diplomatiques, pourtant propriétés de la Russie, elle ne leur a donné que 72 heures pour partir au milieu des fêtes de fin d’année et a fixé un jour où il n’y avait pas d’avion pour Moscou !  Du coté russe cette fois, les diplomates et pseudos-diplomates US ont un mois pour tout mettre en place et une seule villa est neutralisée, avec promesse de la rouvrir dès que les villas aux USA seront restituées. 
 
Là où ça devient plus étonnant c’est que les médias russes et quelques communiqués officiels laissent entendre que ces mesures, somme toute très réduites par rapport à ce que veulent entreprendre les Américains contre eux – et contre nous – au niveau financier et énergétique, aient été présentées aussi comme une “réponse” aux sanctions qui n’ont été ratifiées par Trump que quelques jours plus tard. 
 
Certains ont parlé d’un temps d’avance de la part de Poutine. En fait, il s’agit d’un temps de retard. Volontaire. Mais de retard quand même. Car il ne s’agit que d’une réponse aux mesures d’Obama de décembre 2016 qui étaient restées sans contre-réaction sur le moment. Ceci contrairement aux usages diplomatiques, justement pour ne pas compliquer la tâche de Trump avant sa prise de fonction et pour ne pas relancer une guerre froide stérile, rappelant les usages de l’époque soviétique. C’était plutôt sage et astucieux de la part des Russes mais c’était sous-estimer, comme souvent, le caractère far-west sans foi ni loi des conduites américaines qui de toutes les façons se savent les plus forts et sont convaincus que leurs “excréments sentent meilleur”, comme le disent et l’écrivent des opposants de la gauche américaine. Et en effet, les villas n’ont pas été rendues, des inconnus sont allés les fouiller, les 35 diplomates russes n’ont pas été remplacés car les visas sont refusés aux remplaçants. Toutes les rencontres diplomatiques au plus haut niveau n’ont servi à rien. Les traités diplomatiques et les usages, dont certains remontent au XIX ème siècle, sont allégrement bafoués ainsi que le droit international. Ca ne gêne évidemment pas notre presse otanienne de service mais pour l’information et la conscience citoyenne il est bon de le savoir. 
 
La propagande russophobe a pris des caractères franchement racistes et le Russe a été utilisé comme en d’autres temps d’autres ethnies ou religions comme bouc émissaire pour régler une querelle politique interne à l’establishement américain.  Au point que la russophobie est devenu un “produit” de bonne audience (cf le témoignage d’un employé de CNN sur le site) pour les médias américains. Le même mécanisme dangereux et déplorable que ce qu’a connu l’Europe dans les années trente !  
 
Et cette fois, malgré la torpeur de l’été, les choses sont réellement graves. Les faucons américains de toutes tendances ont pris le dessus et semblent décidés à “mater” la Russie qui s’est permis de résister un peu à son offensive et à sa stratégie de contrôle mondial et de morcellement du Proche-Orient et de l’Eurasie. L’inégalité du rapport de force saute aux yeux et évidemment pour les dirigeants russes en premier lieu. D’où leur réaction assymétrique du faible au fort. Comme souvent, pour qui veut comprendre la conduite des dirigeants russes d’aujourd’hui.
 
Avec un temps de retard dissimulé par le tour de passe-passe de l’annonce médiatique d’une pseudo-réponse aux sanctions, alors que ce n’est qu’une réponse aux mesures diplomatiques américaines de décembre. Il est vrai avec en prime, le dégagement de quelque 755 Américains, spécialisés essentiellement dans l’ingérence systèmatique dans les affaires intérieures russes en formant, encourageant et finançant (budget de 20 millions de dollars par an pour la Russie), toutes sortes d’organisations et de personnes jurant leur hostilité au président Poutine et au gouvernement actuel. En Novlangue otanienne ça s’appelle “soutien aux forces démocratiques” !! Avant les élections de l’an prochain, l’opération d’allégement du dispositif américain n’est pas maladroite de la part des partisans du pouvoir mais en donnant un mois aux Américains, ils leur garantissent la possibilité de mettre en place des structures de remplacement. Sans doute moins efficaces et plus opportunistes tout de même et peut-être mieux surveillées.   
 
Par ailleurs, les dirigeants russes se donnent la possibilité de réagir plus tard, en choisissant un terrain. Mais ça sera loin d’être évident cette fois. Car les Américains ont véritablement entamé une guerre financière et commerciale et veulent mettre la Russie hors-jeu, si possible avant les élections de l’an prochain. Dans cette optique, ils s’en prennent à des oligarques et sans doute des membres de la nouvelle nomenklatura, qui ont des biens et des membres de leurs familles à l’ouest. Les Russes sont des Européens et leur tropisme esttourné vers l’Europe dont ils ont forgé une partie de la culture et de l’histoire. Leurs choix asiatiques sont économiques ou stratégiques, pas affectifs. C’est pourquoi, nous, particulièrement en France, avons tort de suivre aveuglement au niveau de nos médias et de la partie la plus inculte (ou intéressée) de notre personnel politique, la russophobie systèmatique développée par le “leadership” américain pour ses propres intérêts. Pas les nôtres. Le président François Mitterrand en était conscient (voyez interviews de Roland Dumas ex-ministre des affaires étrangères de Mitterrand). Sans même se référer au général qui doit être une toupie dans sa tombe s’il voit ses successeurs !  
 
Ces mesures visant des personnes sont une des faiblesses du système russe. Et les Américains, après les Britanniques savent les exploiter superbement. L’absence totale de patriotisme minimum (contrairement à beaucoup d’oligarques américains) est une des caractéristiques de l’oligarchie russe, souvent de type comprador ou aspirant à l’être. Prompts à profiter des aubaines pour s’enrichir mais réticents à investir et à créer des emplois ou de la recherche dans leur pays ! Bien sûr le phénomène est lié au lancinant problème de la corruption en Russie, qui a atteint des formes caricaturales en Ukraine. Sans aller chercher dans l’histoire plus ancienne, les rumeurs selon lesquelles l’ancien oligarque Khodorkovsky et ses anciens partenaires du groupe pétrolier Youkos, auraient subventionné des membres du Congrès américain pour voter les lois russophobes sont malheureusement plausibles. Ces derniers, qui ont abondamment pillé leur pays dans les années 90, ne reculent devant rien pour en abimer encore l’image afin de mieux corrompre à leur manière les juridictions internationales, notamment commerciales, afin qu’à l’image de tribunaux russes parfois corrompus, les procés qu’ils intentent pour avoir “toujours plus” puissent se faire à charge systèmatiquement contre la Russie et non équitablement. Ils y parviennent souvent, même avec la Cour européenne ! 
 
La partie importante concernant la fourniture par la Russie des matières premières énergétique est évidemment la pièce maîtresse de la guerre commerciale pour les marchés européens. Même si les marchés asiatiques sont importants aussi et reçoivent pour l’instant plus de gaz de schistes que l’Europe. A noter que les sanctions financières américaines peuvent viser aussi des investisseurs asiatiques qui participeraient à la construction de pipe lines ou gazoduc de la Russie vers la Chine ou le Japon. Les Chinois se laisseront-ils autant faire que les Européens ? 
 
L’hypothèse d’une prise de contrôle américain des installations de transit ukrainiennes, complétement obsolètes et dont la remise à niveau d’ici à 2019 couterait aussi cher que le fameux nordstream2, n’est pas à exclure. Mais à la condition que ce soient les Européens qui paient. Ou les Russes eux mêmes, s’ils sont écrasés par l’intérieur par une agitation politique, soutenue par les difficultés économiques et le travail des subventions aux “forces démocratiques”. Ou, plus grave et plus probable, par une guerre déclenchée contre la Russie avec de la “chair à canon” ukrainienne. Les Kiéviens viennent de recevoir des armes anti-chars Javelins et d’autres équipements létaux. Ce n’est sans doute pas par hasard.
 
 Toutefois, pour nuancer le sombre tableau, on peut remarquer que les sanctions ont permis de relancer ou lancer certains secteurs de production en Russie. C’est le cas dans l’agriculture, la chimie, quelques hautes technologies et la défense. Un coup de fouet parfois salutaire à l’économie russe qui avait tendance à se laisser enfermer dans la malédiction de l’économie de rente pétrolière. Quant aux troupes ukrainiennes, malgré la présence des mercenaires, des conseillers américains et des fanatiques en tout genre du nazisme ukrainien et européen (balte et polonais), la motivation au combat et la compétence peuvent se montrer limités et peuvent permettre aux partisans du Donbass de faire la jonction avec d’autres couches de la population dans les régions de Kharkov et d’Odessa qui n’en peuvent plus de la chienlit actuelle. Reste la question de savoir qui paiera pour réhabiliter tout ça. Surtout si la guerre provoquée par les faucons américains est destructrice. 
 
Le plus grave pour nous, pour les Russes et sans doute pour le monde et le risque de guerre, sont les conséquences sur les échanges financiers de l’application de l’extraterritorialité juridique, imposée par les Etats-unis à toutes les économies, y compris la Russie, la Chine, les pays arabes et évidemment l’Union européenne. Les trois premiers détenant en plus une grande partie de la dette américaine dont la devise leur sert de “valeur refuge”… C’est en agissant sur ces domaines de l’économie globalisée que les faucons américains vont tenter d’égorger la Russie et de la réduire à plusieurs états compradors, comme le rêvait feu Zbignew Brzezinsky. 
 
Comment doit réagir l’Europe à une telle situation ? Quels sont nos intérêts réels ? Nos échanges et nos complémentarités avec la Russie sont autrement plus importants que ceux des Etats-unis. Mais à quel point nos oligarques à nous, tout comme certains russes, sont-ils dépendants de la puissance américaine ? Quelle capacité ont-ils de se libérer de l’agenda médiatique, politique et même de genre de vie (way of life) à l’américaine pour se faire un jugement autonome ? 
 
La véritable réponse russe aux nouvelles “sanctions” de l’oncle Sam – si elle intervient – ne pourra se situer qu’au niveau financier aux cotés de la Chine, au niveau commercial avec l’Union européenne, au niveau stratégique et politique avec tous les adversaires momentanés ou permanents des Etats-unis comme la Turquie, l’Iran ou l’Amérique latine et enfin au niveau militaire, en continuant son action en Syrie pour y conserver un allié et empêcher l’envoi de terroristes islamistes, formés par des occidentaux, dans le Caucase et en Asie centrale. Et malheureusement, en Ukraine, où devant la catastrophe économique et humaine ayant résulté de Maidan, les donateurs – essentiellement nos impôts via l’Union européenne –  sont las de remplir un puit sans fond. Les Américains vont commencer à réclamer le paiement des armes qu’ils fournissent. En opérations militaires contre la Russie et sans doute en installations gazières qu’ils feront restaurer aux Européens pour pouvoir leur vendre au prix fort le gaz russe qu’ils obligeront Moscou à fournir à bas prix, moyennant rémunérations de quelques compradors comme les oligarques du passé, toujours aux aguets. Pour la population, ça serait une autre histoire. Une autre défaite comme celle des années 90 mais cette fois sans l’illusion du “tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil” des époques gorbatchévienne et eltsinienne. 
 
A moins que … la force de l’attaque yankee puisse se retourner contre eux. C’est la règle dans les sports de combat japonais. Mais contre la bombe atomique….