Des nouvelles – encore – de la liberté d’expression en Occident
Source : Tribune de Genève, 23/11/2017
La russophobie frappe encore sur notre liberté d’information ! Cette fois par l’intermédiaire de RSF qui se targue de défendre la liberté de la presse et de protéger les journalistes. Il est vrai qu’ils l’oublient parfois quand il s’agit de journalistes tués en Ukraine… Aucune protestation de ce même RSF ni du reste de la presse mainstream contre la visite des chefs des casques blancs pour le moins peu crédibles et engagés du coté des terroristes qui nous attaquent chez nous. Voir les articles de Spoutnik ci-dessous
Voici la reprise des Crises qui cite la tribune de genève à propos de la conférence de presse projetée par Guy Mettan, notre ami auteur du livre sur la russophobie cité dans la rubrique livres.
Guy Mettan sommé d’annuler une conférence de presse consacrée aux Casques blancs syriens
Genève : RSF demande au président du Club suisse de la presse d’annuler une conférence sur les Casques blancs.
Le Club suisse de la presse doit accueillir mardi une conférence de presse consacrée aux Casques blancs syriens. Un sujet sensible. Plusieurs fois récompensée pour son action sur le terrain au profit des populations civiles, l’ONG reste dans le collimateur des autorités syriennes et de son allié russe. Damas et Moscou n’ont eu de cesse de dénoncer la proximité de cette organisation crée par un ancien officier britannique avec les «rebelles syriens». Sous le titre «They don’t care about us» (Ils ne se soucient pas de nous. Casques blancs, leur véritable agenda), la conférence organisée lundi annonce la couleur. Ce qui n’est pas du goût de tout le monde.
Dans un courrier adressé jeudi au Club Suisse de la presse (lire ci-contre), Gérard Tschopp et Christiane Dubois, respectivement président et directrice de Reporters sans frontières (RSF) en Suisse, pressent son directeur, Guy Mettan, de renoncer à l’organisation de cette conférence de presse qui, selon eux, porterait «atteinte à l’image du Club suisse de la presse». Ils menacent de s’en retirer si la conférence n’est pas annulée. Ils accusent deux des intervenants – Vanessa Beeley et Marcello Ferranda De Noli, président de Swedish Doctors for Human Rights – d’être au service de «la propagande russe».
RSF, qui figure dans la liste des membres médias du Club suisse la presse, refuse d’être associé à un tel événement. Joint par téléphone, Guy Mettan avoue tomber de sa chaise (lire sa réponse intégrale ci-contre). «Je n’ai jamais vu une chose pareille, soupire le président. Voilà qu’une organisation qui défend la liberté d’informer me demande de censurer une conférence de presse.»
Guy Mettan, qui a souvent été «attaqué» pour ses engagements «prorusse», assure qu’il s’est toujours employé à donner la parole à tout le monde. «D’habitude, les pressions pour faire annuler des conférences de presse viennent de pays qui sont connus pour être des dictatures. La démarche de RSF me stupéfait. C’est prendre les journalistes pour des imbéciles. Comme s’ils n’étaient pas capables de se faire une opinion par eux-mêmes.» (TDG)
La lettre de RSF adressée à Guy Mettan
Genève, le 23 novembre 2017,
Monsieur le Directeur, cher Monsieur,
Nous avons eu connaissance de l’événement organisé par le Club suisse de la Presse le 28 novembre prochain:
«They don’t care about us». About white helmets true agenda.»
Nous avons également été interpellés sur notre «soutien» à cette conférence, le nom de notre organisation apparaissant dans la liste des membres médias.
Nous nous dissocions totalement de cet événement et ne souhaitons en aucune manière être associés à une conférence
qui accueille une soi-disant journaliste, Madame Vanessa Beeley,qui justifie l’utilisation de la torture par lerégime syrien afin de le préserver.
Quand bien même elle n’a jamais été publiée dans un média indépendant, il est étonnant qu’elle soit référencée au moins deux cents fois
dans les médias russes de propagande (SputnikNews, Russia Today).
De plus, il est pour le moins inacceptable d’inviter Monsieur Marcello Ferranda De Noli, président de Swedish Doctors for Human Rights,
une association qui, selon nos informations, agit comme un outil de propagande russe. Il est probable que vous n’avez pas eu connaissance
de ces éléments d’information, nous tenons le cas échéant les liens utilesà cet effet.
Quoi qu’il en soit, nous vous invitons à renoncer à ce projet qui portera atteinte à l’image du Club suisse de la Presse.
Selon votre décision, nous nous réservons l’opportunité d’étudier de conserver notre carte de membre.
Dans l’attente de vos nouvelles, nous vous adressons, Monsieur le Directeur, cher Monsieur, nos salutations les meilleures,
Gérard Tschopp et Christiane Dubois
La réponse de Guy Mettan à RSF
Chère Madame, Cher Monsieur,
J’ai bien reçu votre courrier qui a retenu toute mon attention.
En ma qualité de membre fondateur de Reporters sans frontières aux côtés de François Gross dans les années 1980, je dois avouer que j’ai été atterré par sa teneur. Je peux comprendre que le fait de donner la parole à des voix dissidentes puisse susciter de la réprobation. Mais de là à exiger l’annulation de cette conférence de presse, il y a un pas dont je n’aurais jamais pensé que vous puissiez le franchir.
D’une part, cela me semble une atteinte grave à la liberté d’expression et en totale contradiction avec la «liberté d’informer et d’être informé partout dans le monde» que RSF prétend défendre dans sa charte et qui figure en toutes lettres sur votre papier à en-tête. Cela reviendrait ensuite à prendre les journalistes et les rédacteurs en chef pour des imbéciles incapables d’analyser les faits et les arguments qu’on leur présente et de se forger une opinion par eux-mêmes.
Par ailleurs, depuis 20 ans que j’exerce mes fonctions au Club suisse de la presse, j’ai toujours été soumis à des pressions afin d’empêcher des gens de s’exprimer. Mais jusqu’ici ces pressions sont toujours venues de régimes autoritaires ou dictatoriaux, tels que la Chine, l’Arabie saoudite, l’Egypte ou le Bahrein. C’est la première fois qu’une organisation de défense des journalistes d’un pays démocratique m’adresse une telle demande. Il va sans dire que je ne peux y donner suite. Ce serait déshonorer un métier qui, je l’espère, est toujours le vôtre.
Plutôt que de pratiquer la censure, je ne peux donc que vous proposer de participer à cette conférence de presse, comme je l’ai d’ailleurs suggéré aux partisans des Casques blancs, et de poser les questions que vous jugerez utiles aux intervenants. Pour ma part, fidèle à l’esprit d’ouverture et de recherche de la vérité qui caractérise le Club suisse de la presse depuis sa fondation, je suis naturellement prêt à accueillir une rencontre de presse avec les organisations qui soutiennent les Casques blancs afin qu’ils puissent faire valoir leur point de vue. Mais ils n’y ont pas donné suite pour l’instant.
Vous me permettrez de ne pas vous répondre en ce qui concerne les attaques personnelles que vous avez adressées à notre consœur Vanessa Beeley et à M. De Noli. Elles sont indignes du journalisme.
Enfin, je vous transmets par courrier séparé quelques-uns des innombrables messages de soutien que je reçois d’un peu partout dans le monde et qui me confortent dans la conviction que la liberté d’expression est désormais davantage menacée chez nous que chez les «autocrates» que vous prétendez dénoncer.
Avec mes messages confraternels
Guy MettanFrançois Hollande a reçu à l’Élysée le 9 octobre Rahed Saleh — le chef des Casques blancs syriens — ainsi qu’une « délégation de personnalités d’Alep ». Des personnalités aussi conviées à l’Assemblée nationale par le groupe PS. Soutien de Manuel Valls et ovation des députés, les Casques blancs, cette « défense civile syrienne », ont vécu une vraie consécration politique.
La visite laisse toutefois une impression de malaise : Rahed Saleh, l’hôte de Hollande, avait été interdit d’entrée sur le territoire américain en avril dernier. Il se trouvait en effet sur une liste de personnes suspectées d’être en lien avec des organisations terroristes, ce qui lui a valu d’être refoulé à l’aéroport. Autre personnalité de cette délégation, Hagi Hasan Brita, président du « comité civil d’Alep », généralement présenté comme le maire d’Alep, ce qui fait aussitôt réagir Vanessa Beeley, journaliste et photographe indépendante, qui s’est dernièrement rendue en Syrie :
« Hagi Assan Brita est présenté comme le maire d’Alep, il n’est pas le maire d’Alep! 1.5 Million de personnes démentiraient qu’il est le maire d’Alep! Il n’a certainement aucune relation avec le conseil local à Alep Ouest qui couvre 75% de la surface l’Alep. Il a été nommé maire en 2016, ce qui est un autre moment de folie! »
L’image de ces « héros du quotidien » encensés par la presse semble tout à coup moins lisse. Les Casques blancs affirment avoir sauvé plus de 62 000 vies et « prodiguer des services publics auprès de 7 millions de personnes ». Même si ces chiffres sont invérifiables, il est clair qu’ils sauvent des vies, mais qui sont-ils vraiment ?
Les origines et le financement des Casques blancs
Créés en 2013 par James le Mesurier, un ancien officier britannique reconvertit dans le mercenariat, dont la société est basée à Dubai, les Casques blancs se présentent comme « une organisation neutre et impartiale », qui ne reçoit aucun financement de « gouvernements ayant un intérêt direct dans le conflit syrien ».
Une information que leur vice-président, Abdulraman Al-Mawwas, a démentie devant l’Assemblée nationale, indiquant que le groupe reçoit ses financements des États-Unis, de l’Angleterre, de la Hollande, de l’Allemagne et du Danemark. Une liste de généreux donateurs, de gouvernements qui ont, comme le rappelle Vanessa Beeley « publiquement pris position et investi en faveur d’un changement de régime en Syrie », relativisant ainsi le critère d’impartialité.
Rappelons que Mark Toner, porte-parole adjoint du Département d’État, le 27 avril dernier, annonçait un soutien au Casques blancs de 23 millions de dollars via USAID, tandis que Boris Johnson évoquait dans une vidéo twittée par le Foreign Office fin septembre, sa « fierté » de leur prodiguer un soutien de 32 millions de Livres (la moitié de l’aide qu’ils reçoivent).
Mais si l’indépendance financière des Casques blancs vis-à-vis des acteurs du conflit apparaît plus comme un élément de langage qu’une réalité, Vanessa Beeley va plus bien plus loin quand elle affirme :
« Les Français doivent se demander pourquoi ces terroristes sont reçus à l’Assemblée et considérés comme des VIP, alors que leurs organisations sont liées à celles qui ont mené les attaques terroristes à Nice et à Paris. »
Si les Casques blancs jouissent d’une telle aura, c’est qu’ils sont passés maîtres dans la communication, voire dans la propagande. Mais derrière l’image positive de sauveteurs extrayant les enfants des décombres se profile aussi celle de leurs sympathies affichées pour certains groupes « rebelles ».
Les Casques blancs ont si bien soigné leur communication que l’ONG a été pressentie pour le prix Nobel de la Paix. Des stars hollywoodiennes, telles que Georges Clooney, Alicia Keys et Ben Affleck ont d’ailleurs lancé une pétition dans ce sens, qui a recueilli plus de 300 000 signatures. Ils ont même eu droit aux honneurs de documentaires, comme celui produit par le service de streaming Netflix ou celui de France 24, RFI et Courrier international.
Mais ce qui attire l’attention en visionnant les vidéos, les posts sur Twitter ou le site de l’organisation, c’est la place qu’y tiennent les enfants. Avec parfois des ratés, comme cette fillette dont la photo a servi à illustrer trois sauvetages dans trois villes différentes, en aout, septembre et octobre de cette année.
Une étude critique des photos de sauvetage abondamment diffusées sur les réseaux sociaux fait apparaître d’autres incohérences, comme ces photos de sauveteurs extrayant des décombres des enfants bien coiffés, sans un brin de poussière ni une blessure apparente. Là encore, s’il convient de prendre ces critiques avec précaution, il est tout de même frappant de constater à quel point l’appareil photo semble faire partie de la trousse de secours de base des Casques blancs.
« L’OPA » sur la Défense civile
LE CÔTÉ OBSCUR DES CASQUES BLANCS 2/3 : LA NEUTRALITÉ ?
Un autre atout maître dans leur communication est d’avoir trusté l’appellation de « défense civile syrienne ». Les Casques blancs occultent du même coup la Protection civile syrienne, l’officielle, qui elle intervient vraiment aux côtés de tous les belligérants et qui est reconnue aussi bien par l’ONU, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), que par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) :
« Les Casques blancs ne sont pas reconnus par l’OIPC [Organisation International de Protection Civile], c’est un point très important. Cela renforce la suspicion que c’est une construction de l’OTAN qui a été implantée en Syrie pour agir comme un groupe de soutien aux terroristes, mais aussi pour produire des contenus de propagande utilisables par les médias mainstream. »
Analyse Vanessa Beeley, ajoutant aussi que :
« Il existe une défense civile syrienne, qui travaille des deux côtés, qui sauve des vies syriennes et qui a été ciblée, leur équipement volé, leurs équipes massacrées. »
Il est donc pour le moins étonnant que la Défense civile syrienne ne récolte pas elle aussi une partie des lauriers médiatiques et politiques dont se parent les Casques blancs. Car ces derniers sont loin d’être les seuls à sauver des vies en Syrie : La Défense civile, donc, mais aussi la Croix-Rouge et de nombreuses autres ONG bien moins médiatisées.